18 mars 2003

 

Gendarmerie tue un jeun de 17 ans à Nîmes

MOURAD, 17 ANS, ASSASSINE PAR LES CONDES

LES FAITS

Nous sommes vers Durfort (Gard). C'est la nuit, samedi 1er mars. Une voiture fuit 4 gendarmes du peloton de surveillance et d'intervention (PSIG) de Saint-Hippolyte-du-Fort. A bord de cette voiture, 3 jeunes : Akim 19 ans Mohammed 18 ans et Mourad 17 ans. Ils vivent dans la cité de Valdegour à Nîmes. Il sont soupçonnés par les pandores d'avoir tenté de cambrioler une maison. Ces derniers ouvrent le feu. A 15 reprises. Mourad est touché à la nuque. Ses copains parviennent à prendre la fuite et le conduisent à l'hôpital de Montpellier. Dimanche, Mourad y décède de ses blessures. Lundi, Akim et Mohammed se rendent à la police. Ils sont placés en garde à vue. Les pandores, eux, après avoir été entendus par l'Inspection technique de la gendarmerie nationale retrouvent la liberté et leur " travail ".

UN SCENARIO D'UNE BANALITE REVOLTANTE

Un gamin assassiné, deux autres en garde à vue, les assassins en liberté et c'est l'explosion à la ZUP lundi soir. Caillassage des CRS, cocktails Molotov, incendies de voitures etc. en un mot : émeute. Re-incarcération, de jeunes émeutiers cette fois, comparution immédiate pour l'un d'entre eux, il prend 12 mois dont 4 fermes. Mardi soir, c'est tout un quartier qui se rassemble autour de la famille de Mourad. Copains d'école, de rouille, amis, parents, voisins, tous rassemblés pour dire leur douleur et appeler au calme : brûler la bagnole du voisin ne résout rien, ça suffit de voir des gamins en prison, il faut construire la lutte !

LE CONTEXTE

La cité de Valdegour a été construite en 1958 pour permettre d'accueillir les rapatriés d'Algérie. Pendant de nombreuses années, classes populaires, moyennes, français, immigrés y ont vécu ensemble. Et puis, comme partout, le quartier, faute de moyens, s'est dégradé. Cette année, un habitant a fait une chute de 3 mètres parce qu'une balustrade n'était plus fixée. Et puis le capitalisme a continué de faire ses ravages. Les pauvres sont devenus de plus en plus pauvres, et les moyennement pauvres ont quitté le quartier. Aujourd'hui, la population est principalement d'origine marocaine ou maghrébine. Le Gard n'a plus ses sources d'emplois traditionnelles qu'étaient les mines et l'industrie textile. Le monde agricole s'est mécanisé et le patronat local, composé essentiellement d'anciens pieds noirs, préfère embaucher des clandestins qu'il parque dans des baraques, exploite comme les colonisés du bon temps de l'Algérie française et paye à coup de lance-pierre. Et puis, comme partout en France, mieux vaut être blond, vivre en centre ville et avoir une qualification pour trouver du boulot. Et voilà une population ultra-précarisée, méprisée, délaissée, ghettoïsée.

RETABLISSEMENT DE LA PEINE DE MORT POUR TENTATIVE DE CAMBRIOLAGE

Depuis lundi, on a les cheveux qui se dressent sur la tête quand on entend les conversations au café du commerce à Nîmes ! " Mais qu'est-ce qu'il foutait dehors, en rase campagne en pleine nuit ? ". " Les flics ils font ce qu'ils peuvent, sinon ce serait l'anarchie ! ". " Ben ouais, pis il avait déjà un casier alors… ". Alors quoi ? Oui, ce gosse avait commis des larcins et succombé aux sirènes de la consommation. Il l'avait d'ailleurs expliqué à une journaliste de Libé qui l'avait interviewé quelques mois plus tôt : " Une fois qu'on a goûté à l'argent sale et qu'on sait qu'on peut gagner en une journée ce qu'on gagne en un mois quand on travaille, c'est difficile d'y renoncer ". Oui la flicaille est chargée de gérer la tension sociale générée par le capitalisme. Et alors ? Ca lui donne le droit de rendre justice elle-même ? Ca lui donne le droit de rétablir la peine de mort ? Ca lui donne le droit de buter un gamin pour vol ? Non, non et mille fois non ! Jamais un autoradio, un mobylette ou même les joyaux de la couronne ne vaudront la vie d'un homme !

PAS DE JUSTICE, PAS DE PAIX

Alors la famille, les voisins, les amis, les associations du quartier les habitants des autres cités et les gens révoltés par ces événements se sont rassemblés pour manifester après-midi et exiger que justice soit rendue. Nous étions un bon millier à partir du lycée Camargue au cri de " Justice pour Mourad ", " Pas de justice pas de paix ", " Gendarmes assassins, Sarkozi coupable ", " 1ère, 2ème, 3ème génération, tous ensemble, on s'en fout, on est chez nous ". Je laisse le " Il n'y a de Dieu que Dieu et Mahomet est son prophète " à celles et ceux qui sont croyants. Manif pour dire sa colère, sa rage, sa haine. Manif pour dire à la famille de Mourad qu'on souffre avec elle. Manif pour exiger la justice. La justice ? Mais quelle justice ? La préfecture a donné le ton en bloquant les bus qui venaient de Valdegour pour empêcher les gens de manifester. Non contente de cette manœuvre, elle a déplacé des cars et des cars de CRS pour bloquer la manif en pleine rue à 200 mètres du départ. Tensions, négociation et finalement, après ¾ d'heure d'attente, nous sommes finalement passés après que les organisateurs aient accepté de changer le parcours. Faut dire que ce week-end, y'a des championnats internationaux de tir à l'arc. Ca fait mauvais genre de troubler une si belle fête… Une fois arrivés à la préfecture, une délégation a été reçue pour exiger que la police cesse de contrôler les gens qui quittaient la manif, pour que les assassins soient suspendus de leurs fonctions et que justice soit faite à Mourad. Les autorités ont obtempéré pour ce qui concerne le premier point. Quant aux deux autres… Ce n'est pas de son ressort… Cette manif me laisse un goût amer. Que 1000 personnes ! Où étaient les lycéens et étudiants qui manifestaient, drapeau bleu blanc rouge en main entre les 2 tours des présidentielles ? Où étaient-ils ceux qui nous interpellaient en tant qu'abstentionnistes pour nous dire qu'il fallait voter Chirac ? Où étaient ils ceux qui nous disaient le 13 mai le combat continue contre le facsisme ? Trop occupés ? Pas concernés ? Pourtant, Mourad avait leur âge, il vivait dans leur ville…

ILS S'APPELAIENT ABDEL, AISSA, HABID, MAKOME, RYAD, SOFIANE, YOUSSEF…

On peut d'ores et déjà craindre l'issue de la procédure conduite à l'encontre des pandores. Combien sont tombés sous les balles des " forces de l'ordre " ? 10 ? 20 ? 30 ? Non, entre 1977 et 2001, elles ont tué 196 fois . Combien de flics ont été condamnés à la hauteur de leur crime ? Aucun d'après l'enquête de Maurice RAJFUS. C'est acquittements, relaxes, non-lieus, sursis et compagnie… Ici, c'est la même juge qui est saisie pour traiter le cas des gendarmes et celui d'Akim et Mohammed. Et puis, le maire de Saint-Hippolyte-du-Fort a lancé une pétition de soutien aux gendarmes… Mais nous resterons mobilisés aussi longtemps qu'il le faudra pour dire que rien ne vaut la vie d'un être humain.

JUSTICE POUR MOURAD !

Sadia, groupe Gard / Vaucluse.

Lien originel : http://www.ouebe.net/fa/

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NOTE de do :

Vous pouvez lire les journaux :

N°62 30 janvier 2002 (À bas l'État policier !)

N°61 22 décembre 2001 (Qui nous protègera de la police ? etc.)


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