27 mai 2007

LIBAN

Fatah al-Islam

Massacre en préparation dans le camp de réfugié-e-s palestiniens de Nahr al-Bared

    Les Palestiniens du camp pensent que le gouvernement libanais (Siniora) projette de démolir Al-Bared afin de faire de la place pour l'énorme base aérienne des États-Unis/OTAN qui doit être construite à côté du camp. La communauté palestinienne du Liban pense que l'ensemble du "très étrange cas" Fatah al-Islam a été fabriqué pour attaquer leur population de 420 000 personnes ici.

http://mai68.org/ag/1170.htm
http://cronstadt.org/ag/1170.htm
http://kalachnikov.org/ag/1170.htm
http://www.ism-france.org/news/article.php?id=6871&type=temoignage&lesujet=R%E9fugi%E9s

    Un nouveau Waco en préparation : à l'intérieur de Nahr el-Bared
     Par Franklin Lamb > fplamb@gmail.com

    Le dernier ouvrage de Franklin Lamb : « The Price We Pay : A Quarter Century of Israel’s use of American Weapons against Lebanon (1978 – 2006) » [Le prix que nous payons : Un quart de siècle d’utilisation d’armes américaines par Israël contre le Liban] est disponible sur Amazon.com.uk. Son ouvrage « Hezbollah : A Brief Guide for Beginners » [Le Hezbollah : Guide abrégé à l’usage des débutants] doit sortir au début de l’été. Le Dr. Lamb peut être contacté à l’adresse mél suivante : fplamb@gmail.com

    Avec un accès à internet très intermittent et ce vieux PC avec un seul fil tiré de la gaine du système de câblage fixée au plafond et attaché avec du ruban adhésif à une douille d'ampoule, plus 8 enfants en bas âge, 2 bébés, rampant au-dessus et au-dessous de cet "étranger" dans la pièce en béton de 10 mètres sur 12 où 28 personnes, voire plus, ont dormi à même le sol la nuit dernière, ce texte de présentation ne sera peut être jamais envoyé.
Mais s'il passe, il s'agit d'une mise à jour sur la situation dans les camps de réfugiés palestiniens de Nahr al-Bared et Bedawi.


Photo Marcy Newman : des enfants du camp de réfugiés de Nahr-al-Bared
déplacés dans une école de l'UNWRA du camp de réfugiés de Badawi

    J'essayerai d'envoyer sous peu les résultats de mes interviews de 11 combattants du Fatah al-Islam concernant qui les a payés, comment ils ont obtenu leur papiers de voyage et des armes et quelle était leur mission. Ils n'ont fait aucun casse de banque. C'est une histoire montée de toutes pièces par le Club Welch (cliquable).

    Désolé, je me suis trompé dans mon précédent reportage.
    La BBC et Fisk se sont fait embobiner.
    En outre, non, aucune tête n'a été coupée. Où sont les rapports médicaux de ceux qui l'affirment ?

    C'était de la propagande pour noircir Fatah al-Islam. Nous devons quitter ce bâtiment, maintenant, ou peut-être pas avant demain, ou allez savoir.

    Bedawi grouille de nouveaux arrivés d'al-Bared où il ne reste ni eau, ni électricité, ni nourriture. Quelques O.N.G. sont toujours en négociation avec l'armée pour pouvoir entrer. (Il est encore possible de s'y glisser par l'Est mais cela devient de plus en plus dangereux de tenter de le faire).

    Le problème n'est pas le risque de se faire tirer dessus par Fatah al-Islam. Ils se terrent. Et l'armée n'a pas la gâchette aussi facile que lundi ou mercredi.

    Les "agents de sécurité" sur le flanc de la colline au-dessus de l'armée qui donne sur al-Bared sont le principal danger de tireur isolé. Les gens affirment qu'ils appartiennent à la milice d'Hariri mais je ne peux pas le confirmer.

    L'armée a dit à l'OLP qu'elle les arrêterait, mais jusqu'à samedi ils tiraient toujours. Ils essayent de tirer sur toute personne qu'ils voient à l'intérieur d'Al-Bared ou qui en sort. Quelqu'un devrait les arrêter.

    Il y a plusieurs heures, j'ai rencontré une femme arrivant d'Al-Bared qui avait marché pendant 11 km avec un bébé de 18 mois et une fillette de 5 ans qui regarde fixement les appareils-photo de la presse avec la bouche ouverte et le regard absent. La mère palestinienne nous a dit que ni ses enfants ni elle n'ont mangé ou bu d'eau depuis quatre jours. Les enfants iront bien. Le mari de la mère est en Syrie, dit-elle, et elle n'a aucun parent.

    Une vieille Mercédès arrive avec 18 personnes : 7 adultes et 11 enfants. Les gens acclament leur exploit.

    Un groupe de 3 personnes d'une O.N.G. de Beyrouth est parti il y a quelques heures en larmes de frustration, de tristesse et de colère après avoir été empêché à plusieurs reprises par l'armée d'emmener des approvisionnements dans Al-Bared. Leur cargaison d'eau et de couvertures a été abandonnée.

    Samedi, le Croissant Rouge palestinien qui, depuis un quart de siècle, fournit des soins médicaux aux deux camps a été officiellement et totalement interdit d'entrer dans Al-Bared et on leur a dit qu'ils se feraient tirer dessus s'ils tentaient d'entrer dans Al-Bared. J'ai rencontré les responsables et les chauffeurs du PRCS.

    Il y a un peu de panique dans Bedawi provoquée par de nombreuses rumeurs. Une rumeur, largement répandue, est que le gouvernement libanais projette de démolir Al-Bared afin de faire de la place pour l'énorme base aérienne des Etats-Unis/OTAN qui doit être construite à côté du camp.

    5000 Palestiniens du camp d'Al-Bared viennent du camp de Tel al-Zaatar à Beyrouth qui a été nettoyé ethniquement en 1976.

    L'OLP les a déplacés à Al-Bared au début de la guerre civile libanaise (1975-90) et ils vivent tous ensemble dans un quartier d'Al-Bared. J'ai vu des femmes pleurer en pensant qu'il pourrait y avoir un autre massacre de Tel al-Zaatar et la destruction de leurs maisons.

    De nombreux jeunes palestiniens ont été arrêtés alors qu'ils quittaient Al-Bared. Une vieille dame qui dormait dans la même pièce que moi la nuit dernière nous a dit que son fils avait été embarqué lundi alors qu'il quittait Al-Bared et qu'elle n'avait plus de nouvelles de lui.

    Il y a maintenant 6 checkpoints entre Tripoli et Beyrouth. Quelques Palestiniens se rendant à Beyrouth ont été arrêtés et emmenés pour interrogatoire.

    Certains d'Al-Bared ont peur de tenter d'aller chez des parents à Beyrouth. Mais certains d'Al-Bared partent vers d'autres camps dans le Sud comme Ain el Helwe à Sidon. À peu près 50 familles sont arrivées à Shatilla et une trentaine à Burj-al-Baraneh.

    La crainte pour les responsables du camp de l'OLP, c'est qu'il pourrait y avoir un massacre. "C'est le complexe de Bush", dit un volontaire d'une ONG allemande. "Le gouvernement libanais veut être macho comme les Israéliens pour obtenir un certain respect. Ce pourrait être un autre Waco en préparation, sans aucune raison."

    L'OLP essaye de négocier avec l'armée pour éviter un massacre qui se produira sûrement si l'armée tente d'entrer dans Al-Bared. "Ce qu'il faut, ce sont des chefs et que les seigneurs de guerre restent calmes. L'armée s'est très mal comportée mais c'est la faute des politiciens."

    La grande crainte, c'est que l'armée tente d'entrer dans Al-Bared.

    L'armée a déplacé la position de la presse à plus de 2 km d'Al-Bared, "pour la sécurité". L'armée a l'ordre de ne fournir aucune information à la presse. Quelques journalistes ont l'impression que quelque chose de terrible va se produire ici.

    Je viens d'apprendre que l'armée a maintenant complètement bouclé le camp. Il n'y a aucun accès aux blessés, toujours dans les sous-sols et les maisons bombardées, qui ont besoin d'aide.

    Un activiste Palestinien à Bedawi dit que si l'armée entre dans Al-Bared et perpètre un massacre, les Palestiniens dans l'ensemble du Liban se battront. C'est peut-être ce qu'espèrent certains ici ou à l'extérieur du Liban.

    Le Club Welch veut que l'armée "élimine les terroristes", et "protége nos frères palestiniens". Pas un seul Palestinien dans les camps, ou observateur que je connaisse, n'y croit.

    Au lieu de cela, la communauté palestinienne ici pense que l'ensemble du "très étrange cas" Fatah al-Islam a été conçu pour attaquer leur population de 420 000 personnes ici.

    L'année scolaire est annulée à Bedawi parce que plus de 20 000 réfugiés d'Al-Bared sont logés chez eux. La nourriture et l'eau arrivent par intermittence, mais la distribution n'est pas encore bien organisée. Il y a beaucoup d'anxiété chez les nouveaux venus qui arrivent avec seulement ce qu'ils peuvent porter.

    Joie de retrouver leurs proches d'Al-Bared. On entend des déclarations dans les rues bondées comme : « Pourquoi l'armée nous a-t-elle tiré dessus ? Il n'y avait aucun combattant dans notre secteur ! », « Où était leur artillerie pendant la guerre de juillet 2006 ? Pourquoi ne se sont-ils pas battus contre Israel et pourquoi nous bombardent-ils maintenant ? »

    La responsable de l'association des Femmes de Nahr al-Bared a accusé le représentant de l’OLP au Liban, Abbas Zaki, de ne pas aider les réfugiés et de coopérer avec le gouvernement Siniora et Israel. "Il devrait venir ici", dit une femme. Abu Ammar ou Abu Jihad (Arafat et son adjoint, Khalil Al-Wazir) seraient venus s'ils étaient vivants". Le Fatah est faible à Bedawi et plus faible encore à Al-Bared.

    Sept factions de l'OLP travaillent dans les deux camps. Elles se sont associées pour chasser Fatah al-Islam de Bedawi le 21 septembre 2006 peu de temps après qu'ils se séparent de Fatah Intifida d'Abu Musa qui était basé à Bedawi depuis 1983. Fatah Intifada gère toujours l'entrée de Bedawi mais il semble n'avoir plus qu'environ 100 membres.

    Quand on les interviewe, ils s'excusent presque de l'attitude de leurs frères, Fatah Al-Islam. "Nous les avons expulsés parce que nous n'aimions pas leurs amis (des membres des renseignements d'Hariri). Ils étaient trop religieux et agissaient de façon étrange mais nous ne pensions pas que les choses en arriveraient là") mais les factions de l'OLP d'Al-Bared n'ont pas d'armes ou de pouvoir pour se confronter à Fatah al-Islam.

    Des exemples étonnants d'humanité se produisent ici. Il y a de nombreux liens de famille entre les deux camps. Les enfants distribuent de l'eau et du pain quand des gens arrivent en voitures de Beyrouth et d'ailleurs.

    Des jeunes filles prennent et s'occupent des bébés de personnes qu'elles ne connaissent pas, elles aident les personnes âgées à trouver de la place où s'asseoir et elles les écoutent quand elles racontent ce qui s'est passé.

    J'ai peut-être tort mais j'ai rarement été témoin de la solidarité entre les gens comme je le vois ici avec les Palestiniens. Corrects, intelligents, patients, charmants, drôles, et prenant soin les uns des autres — déterminés à retourner en Palestine

    Beaucoup de ceux qui sont à Bedawi depuis près d'une semaine maintenant veulent seulement rentrer et mourir dans leurs maisons à Al-Bared.

    Le 25 mai 2007, le groupe palestinien, le Front Démocratique de Libération de la Palestine a tenté d'organiser un convoi pour ceux qui voulaient retourner à Al-Bared.

    Le plan est d'aller le plus loin possible et de refuser de quitter les checkpoints de l'armée jusqu'à ce qu'ils soient autorisés à rentrer chez eux. Le convoi n'est pas encore parti de Bedawi et l'idée pourrait être abandonnée.


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