1 février 2002

 

Le Ben Laden cubain

• La principale tâche d’Otto Reich comme ambassadeur au Venezuela a été de libérer ce diabolique pédiatre, instrument de la CIA, Orlando Bosch, et son complice Posada Carriles, après qu’ils eurent fait exploser l’avion de la Barbade. Pour le FBI, « il a défendu, encouragé, organisé et participé personnellement à des actes terroristes tant aux États-Unis que dans d’autres pays »; le Département d’État lui a refusé un visa en 1987 à cause de « son passé criminel et son implication dans le terrorisme »; le procureur général Joe D. Whitley l’a qualifié de « danger public ». Mais malgré tout cela, il demeure libre et continue à encourager et à organiser des attentats dans le sanctuaire terroriste de Miami, tandis que les cinq patriotes cubains [Note de do voir en AG l'intervention 264]qui ont risqué leurs vies pour mettre en échec ces plans criminels, sont condamnés à la perpétuité. Y a-t-il réellement une guerre contre le terrorisme ?

PAR JEAN-GUY ALLARD, spécialement pour Granma international

« DES exilés ont financé les explosions à Cuba », titrait El Nuevo Herald le 16 novembre 1997. L’affirmation ne peut être plus claire. Cependant, dans le sanctuaire terroriste de Miami, USA, une telle manchette n’émeut personne. Et quelques années plus tard, la métropole anti-cubaine demeure toujours hors d’atteinte de la loi, du Sénat et, y compris, de la multi-millionnaire Guerre contre le Terrorisme.

Exemple vivant de l’ampleur de cette tolérance criminelle, Orlando Bosch, le Pédiatre de la Mort, archi-terroriste anti-cubain, protégé par les Bush, la FNCA et la CIA. Auteur, avec Luis Posada Carriles, de l’explosion en plein vol d’un avion de Cubana de Aviación, qui a provoqué la mort de 73 personnes le 6 octobre 1976, l’assassin Bosch est maintenant représenté personnellement à la Maison-Blanche par son ami de toujours, Otto Reich, qui l’a sorti des prisons vénézuéliennes.

Responsable depuis 40 ans d’un nombre incalculable de crimes terroristes, Bosch, protégé au plus haut niveau de la société nord-américaine, continue à pratiquer son métier de terroriste professionnel, plaidant constamment en faveur de la violence comme méthode de lutte politique.

L’histoire des crimes de Bosch a été racontée plusieurs fois et en différentes circonstances. Mais un récit qui a certainement beaucoup de crédibilité, compte tenu de la relation privilégiée du terroriste avec les autorités étasuniennes, est celle du Substitut du procureur général Joe D. Whitley qui, en mai 1989, a refusé au dangereux personnage l’asile qu’il sollicitait.

À l’heure de la « Guerre contre le Terrorisme », sa décision est d’une incroyable actualité.

UN IMMIGRANT ILLÉGAL ACTIVISTE DU TERRORISME

Dans son analyse écrite du dossier, le procureur Whitley rappelait comment Orlando Bosch Ávila, né à Cuba, avait été admis aux États-Unis avec le statut de visiteur le 28 juillet 1960, avec l’autorisation de demeurer un maximum de 30 jours dans le pays. Cependant, Bosch y est demeuré illégalement, au cours de cette période, jusqu’au 12 avril 1974.

Malgré l’illégalité de sa présence sur le territoire, Bosch, durant huit ans, a occupé la direction du Movimiento Insurreccional de Recuperación Revolucionaria (MIRR) que le magistrat définit comme étant « une organisation terroriste anti-Castro ».

Le 16 septembre 1968, Bosch a participé au lancement d’un projectile de bazooka contre le cargo polonais Polanica, en plein port de Miami. Le 15 novembre 1968, Bosch a été condamné à 10 ans de prison par la Cour fédérale du District de South Florida, pour ce crime et, parallèlement, pour avoir envoyé des menaces écrites au président du Mexique, au chef d’État espagnol, le général Francisco Franco, et au premier ministre britannique, Harold Wilson, en disant vouloir causer des dommages à des navires et des avions de ces pays.

En 1972, Bosch est libéré conditionnellement et abandonne le territoire nord-américain, violant les conditions de sa libération.

Plus obsédé que jamais par sa «mission» terroriste, Bosch créée et dirige la Coordinación de Organizaciones Revolucionarias Unidas (CORU) qui ensuite, toujours selon le document du procureur Whitley, «réclamera la paternité de nombreux attentats à Miami, New York, au Venezuela, à Panama, au Mexique, en Argentine, et dans d’autres endroits».

DES PRISONS DU VENEZUELA AUX TROTTOIRS DU SANCTUAIRE

Le fonctionnaire nord-américain en arrive ensuite à l’attentat de la Barbade, le plus horrible des crimes de Bosch. Il le décrit ainsi: «En octobre 1976, Bosch a été arrêté au Venezuela en rapport avec l’attentat du 6 octobre 1976 contre un avion civil cubain qui a causé la mort de 73 hommes, femmes et enfants. Bien que détenu au Venezuela durant onze ans sous des accusations liées à cet incident, il a été finalement acquitté».

Le magistrat ajoute aussitôt : « À son procès, des preuves ont été présentées selon lesquelles les deux hommes condamnés pour homicide en rapport avec l’attentat étaient en contact avec Bosch, tant avant qu’après l’attentat ».

Et ici une allusion bien claire aux liens privilégiés de Bosch avec l’actuel sous-secrétaire d’État Otto Reich, alors ambassadeur des États-Unis au Venezuela, la CIA et la mafia anti-cubaine de Miami:

« Bien qu’il soit lié à un certain nombre de citoyens des États-Unis ou de résidents permanents qui ont tenté de lui obtenir un statut légal d’immigrant, la requête de Bosch pour obtenir un visa, tant d’immigrant que de non-immigrant, a été refusée en 1987 par le Département d’État à cause de son passé criminel et de son implication dans le terrorisme ».

Il s’agit toujours de ce même individu qui se promène maintenant librement dans les rues de Miami en pleine « Guerre contre le Terrorisme ».

« Cependant, poursuit le procureur Whitley, Bosch est arrivé aux États-Unis du Venezuela, le 18 février 1988, sans documents valides. À son arrivée, Bosch a été détenu sous un mandat d’arrestation pour sa violation des conditions de sa libération en 1974, et il a été incarcéré durant trois mois additionnels ».

Quand il est libéré, le 17 mai 1988, Bosch est aussitôt détenu par les services d’immigration, l’INS. À ce moment, le directeur de district de l’INS a décrété que Bosch est excluable des États-Unis pour différents motifs que cite aussi le procureur Whitley, parmi lesquels se trouvent ceux-ci:

• Il y a des motifs suffisants pour croire qu’il demande l’entrée aux États-Unis pour s’impliquer dans des activités préjudiciables à l’intérêt public;

• Il s’agit d’un citoyen étranger qui plaide en faveur ou enseigne ou a été membre d’une organisation qui plaide en faveur ou enseigne le devoir, le besoin ou la convenance d’attaquer ou de tuer des représentants officiels de gouvernements organisés;

• Il s’agit d’un citoyen étranger qui plaide en faveur ou enseigne ou a été membre d’une organisation qui plaide en faveur ou enseigne le besoin de causer des dommages illégaux ou la destruction de la propriété.

En d’autres mots, Bosch, selon la cour, est un danger public.

FICHÉ COMME TERRORISTE JUSQUE DANS LES ARCHIVES DU FBI

Le portrait de Bosch tracé par le Substitut Whistley se limite au contenu du dossier qu’on lui présente; le «curriculum» terroriste du pédiatre assassin est beaucoup plus vaste, comme nous le verrons. Cependant, en tirant ses propres conclusions, le magistrat fait un bilan dévastateur et termine en repoussant la demande d’asile du «héros» de la mafia de Miami.

Il écrit textuellement:

« Les archives du FBI et d’autres agences gouvernementales contiennent une grande quantité d’information documentaire qui réflète que, depuis le début des années 60, Bosch a occupé des postes de dirigeant dans différentes organisations terroristes anti-Castro. L’information contenue dans ces archives reflète clairement et définitivement que Bosch a plaidé en faveur, encouragé, organisé et participé personnellement à des actes de violence terroriste tant dans ce pays que dans plusieurs autres pays. Alors qu’une partie de cette information est à caractère non-confidentielle, une plus grande partie, tant classée que non-classée, est à caractère confidentiel étant donné la nécessité de protéger des sources et méthodes de renseignement. L’information présentée comprend tous les éléments de preuve à la portée de l’INS, le matériel soumis par Bosch au Commissaire régional et les informations additionnelles classées du FBI ».

On doit noter que la CIA brille par son absence quand il s’agit de documenter les activités de son disciple.

Parmi les différents documents cités ensuite par Whitley, en plus du matériel lié aux procédures comme telles, apparaissent des pièces extrêmement intéressantes. Comme celles-ci :

• « Documents qui montrent qu’en juin 1974, Bosch a confessé publiquement avoir expédié des colis piégés aux ambassades de Cuba à Lima, Madrid, Ottawa et Buenos Aires ».

• « Une entrevue radiophonique de Bosch durant son emprisonnement au Venezuela dans laquelle il plaide en faveur de l’action violente contre le gouvernement du Venezuela. Des lettres de Bosch au CORU exigeant que l’on mène des attentats contre des propriétés vénézuéliennes s’il n’obtenait pas un procès ».

• « Une entrevue enregistrée de Bosch, effectuée par l’auteur d’un article intitulé «Je vais déclarer la guerre» publié dans la revue New Times le 3 mai 1977. Bosch soutient que le CORU est responsable de plus de cinquante attentats, tandis qu’il refuse de réclamer la paternité d’actions posées à l’intérieur des États-Unis à cause de la chaleur du FBI ».

Whitley, en qualité de procureur du gouvernement nord-américain, ne peut certes pas être soupçonné de sympathies pro-cubaines, encore moins dans les années 1980; il s’agit d’un haut responsable de l’appareil judiciaire étasunien, de ce même appareil qui aujourd’hui mène la «Guerre contre le terrorisme», à tout le moins hors du sanctuaire de Miami. La conclusion de son jugement décrit Bosch comme étant un terroriste caractérisé, d’une façon on ne peut plus claire:

« Durant trente ans, Bosch a été résolu et intransigeant dans sa plaidoirie en faveur de la violence terroriste. Il a menacé et mené des actes de violence terroriste contre de nombreuses cibles, y compris des nations amies des États-Unis et leurs plus hauts responsables. Ses actions ont été celles d’un terroriste, exempté des lois et de la décence humaine, menaçant et infligeant la violence sans égard à l’identité des victimes ».

Le magistrat a alors conclu : « Les États-Unis ne peuvent tolérer l’inhumanité inhérente au terrorisme comme moyen pour résoudre les conflits. La conciliation avec ceux qui utilisent la force ne peut qu’engendrer plus de terroristes. Nous devons voir le terrorisme comme un mal universel même quand il est dirigé contre ceux pour qui nous n’avons pas de sympathie politique ».

Les mots de Whistley, qui ordonnera ensuite la déportation de Bosch, ne peuvent être plus actuels.

Mais plus de douze années ont passé depuis ce jugement. Orlando Bosch n’a jamais été expulsé des États-Unis. Bien au contraire. Des pressions combinées de la CIA, de la mafia anti-cubaine et des cercles républicains les plus extrémistes ont obtenu sa libération après que 31 pays aient rejeté la demande officielle nord-américaine d’accueillir le terroriste.

RÉUNION À LA MAISON-BLANCHE POUR ABSOUDRE UN TERRORISTE

Selon le New York Times du 17 août 1989, la congressiste d’origine cubaine Ileana Ross-Lehtinen a négocié personnellement avec le président George Bush, le père, la libération de Bosch. La réunion a été organisée par Jeb Bush qui s’est ainsi assuré l’appui de la mafia anti-cubaine pour son élection comme gouverneur en 2000.

Bosch, le cerveau du Crime de la Barbade, auteur de plus de cinquante attentats tant aux États-Unis que dans d’autres pays, l’apologiste du terrorisme, a reçu le pardon présidentiel de George Bush le 20 juillet 1990.

Orlando Bosch allait-il pour autant cesser de prêcher le terrorisme comme méthode de lutte politique?

Depuis ce moment, son nom a circulé comme possible complice de Luis Posada Carriles, son vieil ami des années de la CIA, dans la série d’attentats survenus à La Havane en 1997.

Dans une entrevue publiée par le Miami Herald en septembre de cette année-là, Bosch avait refusé de confirmer sa participation mais il commentait ensuite: «De toutes façons, même si nous l’avions fait, nous le nierions parce que c’est illégal (de mener des attentats) depuis ce pays».

Et il concluait : « Nous ne critiquons pas cette forme de lutte, si c’est le désir du peuple cubain », confirmant son accord avec les méthodes terroristes.

Au cours du procès fait aux cinq Cubains accusés d’espionnage, l’an dernier, une allégation a surgi selon laquelle Bosch avait confié à un des accusés, infiltré dans son milieu, avoir fait parvenir des explosifs à La Havane au cours de cette même période.

Dernière manifestation de son activisme ininterrompu, cet appel à la violence «avec tous les moyens et méthodes nécessaires» que signait Bosch le 22 août 2001, avec différents complices, dans le Miami Herald, le quotidien prêtant son espace de façon parfaitement irresponsable, à ce geste de promotion de la terreur.

Vint le 11 septembre. Et la guerre contre l'Afghanistan. Une campagne nationale et internationale comme jamais vu auparavant contre le terrorisme. Décrets et lois, budgets de milliards de dollars. Tout pour appuyer la lutte contre le mal.

Et Orlando Bosch marche dans les rues de Miami. Libre comme l’air !

Mieux encore: son associé, son parrain, l’homme qui a comploté sa sortie des prisons du Venezuela et qui a ensuite tout fait pour qu’il puisse se réfugier aux États-Unis, Otto Reich, le plus célèbre agent de la FNCA terroriste, est maintenant à la Maison-Blanche comme responsable de l’Amérique Latine.

Il reste le plus absurde : tandis que l’assassin Bosch se promène à Miami, libre de tramer d’autres attentats avec des dizaines d’adeptes de la violence la plus extrême, protégés eux aussi par la loi de l’impunité... ceux qui sont entrés aux États-Unis précisément pour surveiller les cercles terroristes et empêcher que l’on continue à commettre des actes de terrorisme, demeurent emprisonnés.

Qui se lèvera au Sénat nord-américain pour réclamer une véritable enquête sur Miami, sanctuaire de la mafia terroriste ? Le nombre de morts qui pèsent sur la conscience de Bosch ne dépasse sans doute pas celui de Ben Laden. Mais pour ce qui est du nombre d’actions meurtrières et d’années au «service» du crime, Bosch présente un curriculum inégalable.


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