6 juin 2001

 

J'ai failli mourir en garde à vue

Extraits du compte rendu de la garde à vue les mardi 13, mercredi
14 ,jeudi 15 juin 2000 de Philippe Bonnet membre du bureau national
d'Emgann, dans les locaux de la police politique de l'Etat français
et à l'hôpital de Rennes le jeudi 15 juin au soir jusqu'au lendemain
matin 16 juin 2000.

Contact : facile, car Monsieur Bonnet est actuellement en arrêt de
travail.
Portable : 06 08 50 46 95
E-mail : fulup.bonnet@wanadoo.fr
Attention : ne pas contacter l'autre Philippe Bonnet, boulanger à
Saint-Nazaire ; ce n'est pas le même, et il est, de plus, sourd-muet
comme son épouse.


Jeudi 3 juin 2000 à 7 heures 45 du matin lorsque je m'apprêtais à
partir à mon travail, j'étais d'ailleurs déjà sorti de chez moi, la
porte était fermée à clé et je me trouvais donc dans l'escalier
lorsque j'aperçus par la fenêtre huit personnes avec police sur le
blouson qui sortaient de plusieurs voitures garées sur le parking de
mon HLM . et voilà.(...) Alors, commission rogatoire du juge
parisien Thiel vous êtes bien M. Bonnet, si vous avez des
médicaments à prendre allez y !
(...)
Ils me demandent si je veux voir un docteur, oui bien sûr et
après sa visite, on referme la porte à clé direction les voitures et
l'on repart à trois dans une vieille clio usée vers Rennes. Les
voitures de la PJ de Nantes sont quand même plus vieilles et moins
rapides que celles de la DNAT, ils ne se privent pas d'ailleurs de le
dire. Sant Nazer Redon, la poisse avec les camions, arrivés au
commissariat de Rennes, direction les étages, interrogatoires d'une
heure où deux sur la bagarre avec les flics au salon des bières
bretonnes à Nantes, ils me font voir des photos, etc...
Direction une cellule de 4 m sur 4 ;sale, crachats et sang par
terre, ainsi que sur les murs. Ils m'ont amené des sandwichs au
jambon. Pour boire, il fallait frapper à la porte ainsi que pour
aller aux toilettes. Je n'ai eu aucun problème pour prendre mon taux
de sucre pour mon diabète et pour prendre mes médicaments. Pour
boire, j'avais emmené une bouteille d'un litre cinq de chez moi, elle
a duré une journée, après il a fallu que j'en fasse acheter ou que
j'aille aux toilettes pour boire au robinet.(...)
Ils me remmènent dans ma cellule, me ramènent devant une juge
d'instruction, qui me signifie une prolongation de la garde à vue de
24 heures. J'avais demandé à faire prévenir mes parents, oui bien sûr
mais cela n'a pas été fait...(...)
Le soir tard resandwich au jambon je peux faire sans problèmes mes
soins pour le diabète, je vois un docteur à ma demande à qui je fais
remarquer entre autres que j'ai du interrompre un médicament pour la
tension le Renitec, et que je devais revoir mon docteur habituel ce
mardi. Ma tension était élevée mais ce n'est pas grave c'est le
stress soit disant. Je suis entre 16 et 17 un diabétique qui d'après
les cardiologues ne doit pas dépasser le 12... Donc ce n'est pas
grave ! Avez vous déjà été en garde à vue ? Non, alors essayez de
dormir sur une planche de 21 cm de large, il fait froid, pas de
couverture, lumière allumée en permanence... et du bruit...
Donc trois petites heures de sommeil et petite forme, je peux
faire une toilette de chat, avoir à mes frais des croissants car pour
les médicaments je dois manger(...)
Le soir resandwich au jambon, je vois toujours passer et
repasser les amis, je revois la juge d'instruction qui me confirme
que ma garde à vue est reconduite pour 48 heures. A ma demande,
visite d'un médecin qui se présente comme un médecin légiste, en
général on le voit après ! Je lui dis ma fatigue et que je devais
revoir mon médecin traitant pour le "Renitec", que j'avais encore 17
de tension , il me répond : " ce n'est pas grave, c'est le stress !"
Jeudi matin. Après un petit déjeuner à mes frais, questions (...)
Me voilà raccompagné dans ma cellule, très fatigué, vers 16
heures je pense. Alors vers 18 ou 19 heures je suis obligé de
m'allonger, j'appelle un flic pour demander un médecin. Me voyant
mal, il m'apporte en courant un matelas pour m'allonger par terre et
là je me sens partir. Le médecin est arrivé en moins de 10 minutes,
elle me prend la tension à droite puis à gauche, trois ou quatre
fois j'étais à plus de 19, elle part en courant prévenir les flics
qu'elle ne peut pas me laisser comme cela. Elle court appeler le
SAMU. Un flic dit :" je ferme la porte à clé. " Elle répond : " ce
n'est pas la peine, il ne partira pas en courant. " Elle revient
vite , le SAMU arrive sur le champ, sirène hurlante. Les flics
courent dans tous les sens dans les couloirs ,j'entends crier on me
fait un électro-cardiogramme, on me met sous perfusion, j'ai 24.13
de tension... Ca court dans les étages ils descendent tous. Les
pompiers arrivent, paniqués, les flics disent : " Bonnet va
claquer ." Je l'ai bien entendu et cela m'a été confirmé après. Je
voyais des taches jaunes, rouges etc etc, et les flics danser avec
les gens du SAMU. Cela n'était pas très normal non plus. Je voyais
mal mais entendais clairement ! Me voilà en ambulance, sirène
hurlante, les flics devant, les flics derrière, et les toubibs autour
de moi, la totale ! On arrive à Pontchaillou, CHR de Rennes au
service des urgences en cardiologie. Au bout d'une heure ou deux,
encore sous perfusion, ma chambre gardée par deux flics en uniforme,
un OPJ vient me faire signer ma levée de garde à vue, et ma
libération. J'étais devenu subitement innocent... Cela, je le savais
depuis le début avant de venir à Rennes ,je n'ai pas le même sens de
l'humour que la police française. Les médecins sympas me prêtent un
téléphone pour prévenir ma famille et mes amis. Je reste aux urgences
jusque vers minuit puis l'on me monte au cinquième étage.
Là, allongé sur un lit, toujours sous perfusion, on me fait encore
une prise de sang. Je ne suis ni lavé ni rasé, la totale quoi. Un
échos me fait énormément plaisir, en y repensant j'en ai presque la
larme à l'oeil, même si cela parait idiot, il faut l'avoir vécu pour
le comprendre, ce fut de voir arriver C., M. et E. J'ai su plus
tard, qu'à moins de une heure près, étant diabétique, j'avais frôlé
l'infarctus indolore, les artères risquant l'explosion ce qui aurait
provoqué l'inondation du cerveau et donc la mort... Quand on est
malade, on fait des progrès en médecine... Je ne suis pas prêt
d'oublier cette vision des trois amis venant me voir pour prendre de
mes nouvelles. C'est difficile à exprimer. Mais il faut comprendre la
situation. A eux merci encore et j'espère bien n'avoir jamais à le
leur rendre, de cette manière au moins. Soins jusqu'à une heure du
matin, (l'infirmière avait autorisé les amis à rester 5 minutes . En
fait on les a laissé un peu plus longtemps auprès de moi ).
Impossible de dormir normalement après.
A trois heures du matin, soins, changement de perfusion, prise de
tension (redevenue normale ), de température etc. Réveil à sept
heures fatigué quand même, nouvelle prise de tension, de température.
A huit heures on me refait la même chose avec en plus une prise de
sang et de l'exercice pendant une heure. Je vais téléphoner à ma
famille et à des amis, à Skoazell Vreizh. Tout le monde est paniqué
de Guérande à Espelette, de St-nazaire à St-Brieuc ou au Landreau,
car c'était passé à huit heures du matin à radio France Loire océan
avec mon nom, à France Info sans mon nom , mais, quand on dit " le
responsable du salon des bières bretonnes, et militant breton de St-
Nazaire " cela suffit .Du nord au sud de l'état français, tout le
milieu tégestophile ( collectionneurs de matériel de brasserie ) me
connaît. Cela a également été publié dans le télégramme de Brest,
Ouest France, Presse Océan, RBO, Radio France Armorique, etc. Même
l'Humanité a parlé de moi ainsi qu'à Libération. Je remonte avec ma
perfusion en patère et voit bun flic de la PJ de Rennes. Je lui
demande s'il vient pour moi, il me répond que non mais, je vois le
médecin lui dire : " tenez, voilà le dossier de M.Bonnet." Trahis !
Alors il me rétorque, qu'il était venu prendre de mes nouvelles. Ils
sont humains dans la police française, tout de même... ou alors ils
ont peur.
Les médecins voulaient me garder en observation 24 heures, mais
comme je leur ai promis de ne pas conduire et de me reposer, ils
m'ont laissé sortir le vendredi matin 16 juin 2000 vers 10 heures ?
M. m'a emmené à la gare de Rennes, V. et J. sont venus me chercher à
la gare de Nantes. J'étais très fatigué, mais heureux d'être dehors.
C'est à ce moment que j'ai réalisé qu'il me restait des séquelles :
j'ai bu de la kro sans alcool et je l'ai trouvé bonne. J'en ai même
repris ! A. est venue me chercher le soir à Nantes, m'a ramené chez
moi où j'ai trouvé mon appartement en vrac, et où je n'ai , bien sur,
pas pu dormir.
Depuis le 17 juin :
- j'ai eu trois semaines d'arrêt de travail,
- j'ai eu des tranquillisants pendant presque un mois,
- j'ai repris le travail pendant une semaine et suis parti en
vacances un mois.
- Note : total des arrêts de travail pour Monsieur Bonnet
depuis juin 2000 : 10 semaines en 2000 et déjà 10 semaines en 2001 !
Cela commence à aller mieux, Mais encore maintenant, s'il y a du
bruit vers 6 ou 7 heures du matin, je panique et stress
complètement. J'ai toujours ces images de cellule, de barreaux, de
lumière allumée en permanence, de bruit qui reviennent régulièrement.
Le soir, je vérifie I5 fois que ma porte et mes fenêtres sont bien
fermées, avant d'aller dormir.
Pour les non initiés qui liront ce texte :
Emgann : mouvement de la gauche indépendantiste bretonne.
Skoazell Vreizh : association de secours aux prisonniers politiques
Bretons et à leurs familles.
DNAT : division nationale anti-terroriste, police politique de l'état
français, pays dit des droits de l'homme .
PJ : police judiciaire
Démocratie française : science fiction
Fait à Sant Nazer, Breizh, en juillet 2000.
Revu et corrigé en octobre 2000.


Site internet
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